Le ministre des Affaires étrangères Ahmed Attaf s’entretient avec l’agence Nova

La relation entre l’Italie et e l’Algérie a dépassé les meilleures attentes, mais elle n’est pas limitée au gaz naturel. La relation entre l’Italie et l’Algérie a dépassé toutes les attentes, mais elle ne se limite pas au gaz naturel. Si l’on examine de plus près, il s’agit d’un partenariat stratégique global qui englobe la coopération industrielle – notamment avec la nouvelle usine Fiat en construction à Oran – les grandes questions régionales telles que les crises libyenne et tunisienne, et une convergence de vues presque totale sur le prétendu Plan Mattei de l’Italie pour l’Afrique. Il n’est pas surprenant que l’on reconnaisse le rôle majeur de soutien, d’amitié et de proximité joué par Enrico Matteile fondateur d’Eni, envers l’Algérie pendant les années de la guerre de libération nationale (1954-1962). Lors d’un entretien exclusive accordée àAgence Nova», le ministre des Affaires étrangères de l’Algérie, Ahmed Attaf, explique que sa décision de choisir l’Italie comme première destination pour une visite bilatérale à l’étranger confirme une fois de plus l’excellence des relations entre les deux pays, dépassant même les attentes.

Hier, le nouveau chef de la diplomatie algérienne, âgé de 69 ans, nommé le 18 mars dernier, a eu une longue réunion à la Farnesina avec le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Antonio Tajani. Selon ce que on a appris, la réunion a été si longue que le protocole a dû intervenir à deux reprises pour rappeler aux ministres que le temps imparti était écoulé. Ahmed Attaf commente : « Les discussions étaient si enrichissantes et couvraient tant de sujets que deux heures ne suffisaient pas. »Agence Nova« Il y a tellement de choses à faire et à dire. Avec Tajani, nous avons tout d’abord fait le point sur nos relations et notre collaboration, évaluant ce qui a été réalisé conformément aux directives de nos dirigeants le président Abdelmajid Tebboune, le président Sergio Mattarella et la première ministre Giorgia Meloni. Je dois vous dire que les résultats ont largement dépassé nos attentes », ajoute le ministre.

Au cours des trois dernières années, les relations entre l’Algérie et l’Italie se sont considérablement renforcées. Deux visites d’État, un sommet bilatéral et de nombreuses visites ministérielles ont été effectuées, démontrant l’engagement mutuel à promouvoir la coopération. De plus, pas moins de 30 accords de coopération ont été signés dans divers secteurs. « Au début du mois de juin, une délégation de 100 entreprises italiennes, dirigée par le ministre de l’Agriculture Francesco Lollobrigida, est allé en Algérie. Nous assistons aujourd’hui à l’ouverture de la foire d’Alger avec l’Italie comme invitée d’honneur. Le commerce entre les deux pays a enregistré une augmentation notable de 250% par rapport à l’année précédente », a ajouté Attaf. Le commerce entre l’Algérie et l’Italie a atteint un niveau record de 20 milliards d’euros en 2022, soit plus du double des 8 milliards de l’année précédente, selon les données citées sur le site « Infomercatiesteri.it »: l’Italie est devenue le premier partenaire commercial du pays dans tous les Afrique et Moyen-Orient. La balance commerciale est clairement en faveur de l’Algérie, compte tenu de ses importantes exportations de gaz vers l’Italie, mais, à l’exception des hydrocarbures, la situation est inversée, avec un excédent italien d’environ 70 %. Les exportations italiennes en 2022 se sont en effet élevées à 2,31 milliards d’euros, en hausse de 31% sur un an, une tendance qui s’est poursuivie également au premier trimestre 2023, avec un gain pour le Made in Italy égal à 628,62 22,9 millions d’euros (+18,28 % sur une base annuelle). Les importations en provenance d’Algérie, en revanche, ont atteint une valeur totale de 2022 milliards d’euros en 194,6, un boom de 16,65% en raison de la forte augmentation des importations du secteur « produits des mines et carrières », dans lequel le gaz naturel est également inclus. , d’un montant de 1,63 milliards d’euros. Corrigées de ce dernier chiffre, les importations de l’Algérie vers l’Italie s’élèvent à XNUMX milliard d’euros, avec un solde net d’hydrocarbures en faveur des produits italiens.

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L’Algérie soutient également l’ambition de l’Italie d’être un hub énergétique clé pour le continent européen. « Le Président Tebboune a insisté sur le fait que l’Italie a le plein soutien de l’Algérie pour devenir un hub énergétique de l’Europe. Cette déclaration souligne l’engagement de l’Algérie à soutenir l’Italie dans cette importante ambition », déclare Attaf. Le ministre a expliqué que la position de l’Algérie sur ce dossier « a été renforcée » grâce à l’accord sur « l’un des projets euro-méditerranéens les plus importants du siècle », à savoir la construction d’une infrastructure sous-marine pour relier l’Algérie à l’Italie « permettant ainsi la transfert d’électricité, de gaz et d’hydrogène vers l’Europe ». Selon le chef de la diplomatie algérienne, il s’agit « d’un projet véritablement historique, qui est d’une importance capitale ».

Quand on parle des relations entre l’Italie et l’Algérie, selon Attaf, l’énergie et le gaz naturel viennent immédiatement à l’esprit. « Cependant, au cours des trois dernières années, notre relation bilatérale est allée au-delà des hydrocarbures pour inclure d’autres secteurs diversifiés. Nous avons développé des partenariats dans des secteurs comme la construction navale, le secteur ferroviaire, l’industrie pharmaceutique, et notre collaboration la plus pertinente est sans aucun doute l’industrie mécanique, notamment l’accord avec Fiat qui avance très bien », commente le ministre, faisant référence au Tafraoui. -L’usine Orano qui devrait produire la première Fiat 500 « Made in Algeria » d’ici fin 2023. « L’Algérie attache une grande importance à ce projet, qui a un caractère symbolique et couronne un long processus de coopération », conclut le ministre.

Ce n’est pas tout. L’ Algérie soutient la « philosophie » du plan Mattei que l’Italie lancera en octobre pour soutenir l’Afrique avec le double objectif de créer un développement économique et de contenir les flux migratoires irréguliers. « Nous avons à traiter avec des migrants en situation irrégulière, ainsi qu’à ceux qui transitent par notre pays. C’est là que l’on retrouve une convergence d’idées avec le plan Mattei italien, encore en réflexion. Il est inapproprié de traiter les migrants qui luttent pour leur survie avec des mesures autoritaires, des lois restrictives ou des interdictions. Il est essentiel d’initier des projets économiques visant à stabiliser les populations en fournissant des services tels que l’accès à l’eau, à l’électricité, au travail, aux soins de santé et à l’éducation. En répondant aux besoins vitaux et essentiels, les gens seront moins enclins à chercher des opportunités ailleurs. Les déplacements de ces populations sont souvent motivés par la recherche de la satisfaction de leurs besoins fondamentaux », précise Attaf. Le plan Mattei proposé par l’Italie, dans sa philosophie globale, « aborde cette dimension en essayant de satisfaire les besoins vitaux des populations et de favoriser leur installation par la coopération internationale la plus large possible », selon Attaf.

Le chef de la diplomatie algérienne cite ensuite quelques exemples de coopération internationale sur la question migratoire, bien qu’avec une approche limitée dans sa portée ou sa mise en œuvre. « Il y a eu des discussions entre l’Algérie et les Pays-Bas visant à agir au Niger pour stabiliser les populations locales. De même, il y avait eu une réflexion entre l’Algérie et le Canada pour contribuer à la stabilisation des populations au Mali. Cependant, il faut adopter une approche plus large, capable de toucher un plus grand nombre de populations », affirme le chef de la diplomatie algérienne. « Si le projet Mattei est vraiment mis en œuvre dans toute l’UE et dans toute l’Afrique, à mon avis, il pourrait vraiment toucher un nombre considérable de populations africaines. Dans ce contexte, il y aurait une réelle opportunité d’avoir un impact significatif sur la situation migratoire », ajoute Attaf.

Quant aux questions internationales, le ministre algérien a ensuite répondu aux propos de son homologue français, Catherine Colonna, concernant le texte de l’hymne national algérien, jugé « hors du temps » par le chef de la diplomatie à Paris. En particulier, Attaf s’est dit « étonné par le fait que la ministre française des Affaires étrangères ait cru pouvoir exprimer une opinion sur l’hymne national algérien ». Le chef de la diplomatie algérienne, qui se trouve aujourd’hui en Italie pour sa première visite bilatérale à l’étranger, ironise : « Peut-être aurait-elle pu aussi critiquer la musique. Peut-être même que la musique ne lui convenait pas. » Le ministre algérien a souligné que « pour certains partis ou hommes politiques français, on a l’impression que l’Algérie est devenue un sujet facile à utiliser à des fins politiques ». Attaf a ensuite ajouté : « Ensuite, ils nous parlent des accords sur la permanence des Algériens en France. Nous ne comprenons vraiment pas pourquoi ils doivent faire autant de bruit. Comme je l’ai déjà dit, ces gens adoptent ces attitudes pour (saisir) des opportunités politiques. » Interrogée par les médias français, la ministre Colonna a jugé la décision prise par l’Algérie de jouer l’hymne national algérien en entier lors des cérémonies commémoratives en présence du président de la République,Abdelmajid Tebboune. Il est également inclus un couplet de l’hymne national du pays d’Afrique du Nord, tiré du « Kassaman » (Le Serment de l’Algérie), écrit par le poète Moufdi Zakaria, qui fait polémique entre Paris et Alger : « Ô France ! Le temps des bavardages est terminé. Nous l’avons fermé comme on ferme un livre. Ô France ! Le jour est venu où il faut rendre compte. Sois prêt! Voici notre réponse. Le verdict, notre révolution le rendra. Parce que nous avons décidé que l’Algérie vivra », lit-on dans le texte critiqué par le chef de la diplomatie française.

Espace aussi pour les crises en Libye et en Tunisie. Sur le premier point, Attaf a déclaré qu’il est essentiel de « faire preuve de réalisme » lorsqu’il s’agit d’une solution politique. « Il est essentiel de souligner un aspect important concernant la Libye : le silence des armes. L’absence de combats sur le front militaire offre une opportunité de trouver une solution politique », estime le chef de la diplomatie algérienne. « Notre position repose sur trois points clés. Premièrement, nous reconnaissons le Gouvernement d’unité nationale, qui jouit de la reconnaissance de la communauté internationale, en particulier de l’ONU. Le deuxième point important est qu’il nous semble essentiel que toutes les parties intéressées se réunissent autour de la table pour discuter du passage à la phase électorale, y compris les élections législatives et présidentielles. Le troisième point concerne notre soutien à l’action de Abdoulaye Bathily, représentant de l’ONU en Libye, dans sa recherche d’une formule pour établir une base légale pour les élections », rapporte Attaf. « Il est essentiel de faire preuve de réalisme dans un projet politique et la réalité nous montre que travailler ensemble pour organiser des élections est le seul moyen de traiter démocratiquement et irréprochablement la question du pouvoir en Libye », ajoute le ministre.

La Tunisie, selon Attaf, traverse un « moment très difficile » et « la meilleure façon de l’aider n’est pas de lui imposer des charges supplémentaires qui pourraient aggraver sa situation actuelle ». «L’Algérie a également traversé une phase similaire dans les années 90, confrontée à des difficultés économiques et recourant à un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) pour un programme d’ajustement structurel, suivi d’un accord de confirmation. Nous comprenons les implications des conditions imposées par le FMI, surtout lorsqu’elles concernent des questions sensibles en Tunisie », déclare le chef de la diplomatie algérienne. « Il est vital que nos amis européens comprennent le traumatisme des Tunisiens et l’impact profond que les événements de 1984 et 1986 ont eu sur le peuple tunisien. La suspension des subventions a déclenché des troubles qui, malheureusement, ont fait de nombreuses victimes », rappelle Attaf, évoquant les émeutes du pain et les crises économiques des années quatre-vingt. Le ministre algérien des Affaires étrangères a également voulu adresser un message aux partenaires européens et américains : « Quand une nation a déjà fait face à des circonstances extrêmement difficiles, la meilleure façon de l’aider est de ne pas lui imposer des charges supplémentaires qui pourraient aggraver sa situation actuelle ». Attaf souligne ensuite que les Tunisiens ne sont pas du tout contre les réformes économiques. « Au contraire, ils ont toujours été des pionniers dans ce domaine. Cependant, il est important de noter que la Tunisie traverse actuellement une période très difficile. Des réformes économiques peuvent être envisagées, mais il est indispensable de les mettre en œuvre dans des conditions pas trop pénibles pour le peuple tunisien », ajoute l’exposant du gouvernement d’Alger. Enfin, le ministre des Affaires étrangères exprime « une grande appréciation pour le tact et la sensibilité dont a fait preuve l’Italie dans son approche de la situation difficile que traverse la Tunisie : je crois que nos frères tunisiens apprécient particulièrement la sollicitude caractéristique de l’Italie dans son approche de la situation tunisienne ».

En ce qui concerne, la situation au Sahel, où le terrorisme ne cesse de croître, elle « est extrêmement préoccupante » et représente un « défi majeur », ajoute Attaf. « Nous sommes face à des groupes lourdement armés opérant dans une vaste étendue du Sahel, qui s’étend du Burkina Faso au Mali et comprend une partie du Niger », rapporte le chef de la diplomatie algérienne. « L’Algérie a créé le Comité opérationnel interarmées (Cemoc) et a proposé aux pays membres de ce groupe, comme la Mauritanie, le Mali et le Niger, de revoir la capacité opérationnelle de ce comité. Certains pays ont accepté nos propositions, d’autres sont encore à l’étude. Cette coordination régionale peut apporter une contribution significative à une lutte efficace contre les groupes terroristes dans la région », déclare Attaf, expliquant que le Mali préoccupe beaucoup les autorités algériennes. « Les accords d’Alger, qui visent à trouver une solution politique et durable à la crise malienne, connaissent malheureusement un retard dans leur application. Depuis 18 mois, ces accords sont gelés et ne font plus l’objet de discussions entre le gouvernement malien et les mouvements du nord du Mali. Nous essayons actuellement de relancer une dynamique pour l’application effective de ces accords », ajoute Attaf.

Le ministre algérien des Affaires étrangères a confirmé que son pays a l’intention de rejoindre le groupe BRICS, qui comprend actuellement le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, et a demandé à rejoindre l’Organisation de coopération de Shanghai (Sco), pour l’instant en tant qu’observateur. « Nous avons exprimé notre intention de rejoindre les BRICS et attendons avec impatience le sommet qui se tiendra en Afrique du Sud en août. Nous avons été informés que des décisions sur les critères d’adhésion seront prises à cette occasion. Nous attendons ces décisions », déclare Attaf, ajoutant que son pays entend contribuer au capital de la New Development BRICS Bank. « En outre, nous avons également demandé à devenir un pays observateur dans le cadre de l’Organisation de coopération de Shanghai », ajoute Attaf. « Dans la lecture stratégique du président de la République, Abdelmajid Tebboune, un centre de gravité s’est formé en Asie centrale. Afin de préserver et de défendre les intérêts nationaux de notre pays, le président a donc significativement orienté la diplomatie algérienne vers cette région du monde », rapporte Attaf.

Enfin, le ministre algérien a énuméré les priorités de l’Algérie pour le Conseil de sécurité des Nations unies, après son élection en tant que membre non permanent pour la période 2024-2025. « Nous avons trois catégories de priorités. Le premier concerne les priorités mondiales telles que l’amélioration du système de sécurité collective, la réhabilitation du multilatéralisme et la promotion de la résolution pacifique des conflits », explique Attaf. « La seconde concerne des conflits spécifiques dans notre région (africaine). Il est de notre devoir d’œuvrer au sein du Conseil de sécurité pour trouver des solutions politiques à ces crises, comme la crise en Libye, la crise au Soudan et la crise au Mali après le retrait de la MINUSMA (la mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations unies au Mali, éd. .). Il y a aussi le conflit du Sahara occidental et la question palestinienne, qui sont pour nous d’une grande importance. Nous devons régler tous ces conflits au sein du Conseil de sécurité », ajoute le ministre. La troisième priorité de l’Algérie concerne les questions institutionnelles, notamment la réforme du Conseil de sécurité. « Actuellement, l’Afrique est le seul continent qui n’a pas de siège permanent au Conseil de sécurité. Même dans les sièges non permanents, la représentation n’est pas équitable pour la population africaine. Un autre problème concerne la démocratisation de la prise de décision au niveau international, notamment au sein du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et du Conseil de sécurité. Il faudrait envisager une autre formule institutionnelle associant l’Assemblée générale, plus démocratique, aux enjeux du maintien de la paix et de la sécurité internationale », conclut Attaf.

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