Trump désavoué de l’intérieur

La surprenante et condamnable décision, annoncée le 10 du mois en cours, du président américain sortant, Donald Trump, de reconnaître la souveraineté du royaume du Maroc sur le Sahara occidental n’en finit pas de faire des vagues. Et ce, aussi bien à l’intérieur des Etats-Unis qu’en dehors. Dans les deux cas, pour sa violation de la légalité internationale. La condamnation de la décision de Trump est, en effet, large. Et de poids.

Comme l’atteste le rappel, dans les heures qui ont immédiatement suivi ladite annonce, par le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, et par le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, du caractère indépassable du cadre onusien pour le règlement de la question sahraouie. Une position, au demeurant, également partagée par des représentants de pays connus pour être proches du Makhzen. A l’instar du chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian.

Aussi importantes qu’elles puissent être, ces réactions (de rejet), et d’autres, ont été toutefois éclipsées – médiatiquement, s’entend – par celles des deux anciens envoyés spéciaux américains du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental. Et ce, tant elles ont été tranchantes. Pour James Baker, qui l’a été de 1997 à 2004, la normalisation des relations” entre l’entité sioniste et le royaume de Mohamed VI, telle qu’elle a été concrétisée, constitue “un compromis cynique” et ce, dans le sens où il a sacrifié “le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination”. Bien mieux, il voit dans la décision du président sortant de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental “un oubli regrettable” d’une vérité historique; à savoir que les Etats-Unis eux-mêmes ont été fondés sur le même principe; celui de l’autodétermination.

Quant à Christopher Ross, qui, lui, a exercé sa mission de 2009 à 2017, il n’a pas hésité à qualifier la décision de Trump “d’insensée et d’irréfléchie (qui) va à l’encontre de l’engagement des Etats-Unis à l’égard des principes de l’annexion des territoires par la force et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes”; principes qui sont, a-t-il tenu à le préciser, “tous deux inscrits dans la Charte des Nations Unies”.

Toute la question est de savoir si cette réaction de rejet de ces deux éminentes personnalités politiques américaines, de par la fonction d’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental qu’ils ont eu à exercer, longuement et à des moments différents, très au fait du dossier sahraoui, amènera le futur locataire de la Maison Blanche à revenir sur la décision controversée de son inénarrable prédécesseur; surtout que cette décision, en plus de violer la légalité internationale, est en contradiction flagrante avec tous les engagements internationaux pris par les Etats-Unis sur le dossier même.

En clair, Joe Biden va-t-il désavouer Donald Trump comme l’ont franchement fait James Baker et Christopher Ross. La réponse, après le 20 janvier 2021, date de l’entrée en fonction officielle du 46éme président américain…

  • Mourad Bendris